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17 février 2009 2 17 /02 /février /2009 13:02

Lettre du professeur Grimaldi au Président de la République

 

à Monsieur Jacques CHIRAC

Président de la République

Palais de l'Elysée

55 Faubourg Saint Honoré

75008 PARIS

 

 

Paris, le 1er mars 2004

 

Monsieur le Président de la République,

 

Les Ministres de la Santé et de l'Education Nationale, alertés par 244 professeurs de médecine de l'AP-HP, ne semblent pas avoir pris la mesure de la gravité de la situation des hôpitaux publics. C'est pourquoi nous, médecins hospitaliers de toute la France, nous adressons directement à vous, garant de la qualité des services publics qui sont au cœur de la République.

 

La crise hospitalière s'explique en grande partie par la pénurie de personnel médical et para-médical alors que l'augmentation des besoins de santé et les progrès de la médecine réclament des effectifs croissants.

 

La pénurie de médecins est due à un numerus clausus trop restreint, trop longtemps maintenu. Elle a été aggravée par les conséquences non maîtrisées de mesures réduisant le temps de travail et modifiant les conditions d'exercice des personnels médicaux et para-médicaux. Le manque de personnel médical, en particulier de jeunes médecins (internes), est tel que la plupart des médecins seniors hospitaliers sont conduits à assumer des tâches de première ligne au détriment de leur activité de formation et de recherche. L'activité des services s'en trouve entravée et la formation des internes altérée. L'hôpital n'a plus pour eux l'attractivité qu'il avait pour nous. Notre relève n'est plus assurée, l'avenir est menacé.

 

Cette situation, qui use et abuse du dévouement de la plupart des médecins hospitaliers ne pourra pas durer, d'autant que dans le même temps, les tâches administratives ne cessent d'augmenter, souvent sans hiérarchisation, sans cohérence, voire sans pertinence par rapport à notre première mission : le soin des patients..

 

L'augmentation des besoins de santé de la population et les progrès de la médecine appellent à l'évidence une redéfinition des fonctions et des structures de l'hôpital. Celle-ci doit se faire à partir de projets regroupant des activités médicales semblables ou complémentaires (fédérations de services, départements ou pôles) donnant la priorité à la qualité des soins, au développement de la recherche clinique, et à l'amélioration de la formation. Le pire serait d'utiliser cette crise pour restructurer l'hôpital, non pas en fonction de projets médicaux, mais en fonction de critères purement gestionnaires visant à utiliser les infirmières voire les médecins de façon indifférenciée au sein de pôles hétérogènes sans cohérence médicale. Il ne pourrait en résulter qu'une aggravation de la démotivation des personnels soignants et une dégradation de la qualité des soins.

 

Nous souhaitons participer à une optimisation des coûts de santé, c'est-à-dire à la définition de la meilleure qualité des soins pour le meilleur coût, mais il ne nous appartient pas de gérer la pénurie en restreignant l'accès aux soins.

 

Nous en appelons solennellement à votre autorité pour que :

1°) le numerus clausus fixant l'entrée dans les études de médecine soit élargi plus rapidement que prévu pour atteindre 7 000 à 8 000 par an (sachant que cette mesure n'aura d'effet que dans 7 à 8 ans)

2°) des mesures urgentes soient prises pour l'augmentation immédiate du personnel médical par l'embauche de médecins hospitaliers mi-temps ou plein temps ou contractuels (le déficit se chiffre à plusieurs centaines de praticiens)

3°) les médecins hospitaliers arrivés à l'âge de la retraite puissent rester en activité sur la base du volontariat

 

Votre intervention montrerait qu'il est encore possible dans notre pays d'être entendu pour défendre une cause nationale sans être contraint d'en appeler à l'opinion publique.

 

Nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, à notre attachement au service public hospitalier, qui jusqu'à présent, faisait honneur à la France..

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